Nous sommes en 1912. Du 17 au 19 avril, des manifestants ont pris d’assaut les rues de Fès-Jdid, la partie sud-ouest de la Capitale spirituelle du Royaume. Juifs, musulmans et étrangers, malgré les restrictions sanitaires imposées par les autorités du Protectorat français, ont marché pour réclamer la fin de la misère, de la disette, de la peste, du typhus, du choléra et de la variole. Les autorités françaises ont réagi en sortant les armes et les mitraillettes, provoquant des troubles dans la ville.
Au milieu de ce chaos, l’hôpital Cocard était le refuge des victimes, accueillant plus d’un millier de patients par jour. En moins d’une semaine, le nombre d’habitants des quartiers du sud de Fès a considérablement diminué.
Les épidémies et les victimes étaient malheureusement monnaie courante à Fès à cette époque. Les dispensaires existants étaient jugés insuffisants par les médecins militaires français, ce qui a conduit à la décision de construire un grand hôpital moderne et multidisciplinaire. Cet hôpital devait être capable de sauver les survivants des épidémies de choléra, variole, peste et typhus qui avaient ravagé le Maroc dans les décennies précédentes.
Les années 1912 à 1938 sont souvent appelées « les années des épidémies » par les historiens. La variole, le typhus, la peste et d’autres maladies faisaient des ravages à Fès et dans tout le Maroc.
Au milieu de ces tragédies sanitaires, un médecin humaniste du nom de Dr. Cristiani a joué un rôle crucial. Originaire du 4ème Goum de la Kasbah militaire Ben Ahmed, il a initié une collecte de fonds pour la construction de l’hôpital Cocard. Ce médecin respectait le serment d’Hippocrate en refusant toute forme de discrimination basée sur la religion, la couleur de peau ou les opinions politiques. Décoré de nombreuses distinctions pour son engagement, le Dr. Cristiani a continué à pratiquer la médecine jusqu’à sa retraite.
Aujourd’hui, l’hôpital Cocard est connu sous le nom de l’hôpital Ibn al Khatib. Inauguré en 1912, il est devenu le Centre hospitalier régional de Fès. Sous la tutelle du ministère de la Santé, il reste un établissement autonome géré de manière professionnelle.
En commémorant les actions héroïques du Dr. Cristiani et de tous ceux qui ont lutté contre les épidémies à Fès en 1912, nous rendons hommage à ceux qui ont contribué à la santé et au bien-être de la population marocaine.