L’Assemblée nationale a approuvé, mardi soir, à une large majorité l’accord de sécurité entre Paris et Kiev, malgré l’abstention du RN et l’opposition de LFI et des communistes, lors d’un vote non contraignant. De son côté, le président Emmanuel Macron s’exprimera « sur le soutien de la France à l’Ukraine » dans le journal de 20 heures de TF1 et France 2 jeudi.
Les députés français se sont prononcés, mardi 12 mars, à une nette majorité en faveur de l’accord de sécurité signé entre la France et l’Ukraine en réponse à l’invasion russe.
Lors de ce vote non contraignant qui a suivi un débat à l’Assemblée nationale organisé à la demande du gouvernement, pendant lequel le Premier ministre Gabriel Attal a appelé les élus à ne pas « fuir leurs responsabilités », 372 députés ont voté en faveur de l’accord, tandis que 99 l’ont rejeté – les élus de La France insoumise (LFI) et communistes principalement. Le groupe du Rassemblement national s’est abstenu.
Le président de la République, Emmanuel Macron, s’exprimera sur l’Ukraine jeudi, dans le journal de 20 heures de TF1 et France 2, ont annoncé les deux chaînes quelques minutes après le vote.
« S’abstenir c’est fuir » et voter contre c’est « tourner le dos à notre histoire » : Gabriel Attal a égratigné le Rassemblement national et les Insoumis à l’ouverture des débats. Mais le Premier ministre s’est surtout adressé directement aux Français, en insistant sur les risques « concrets » et « tangibles » d’une victoire russe pour leur vie quotidienne.
Ce qu’il faut retenir du discours de Gabriel Attal
Deux ans après le déclenchement de la guerre, un succès de Vladimir Poutine serait un « cataclysme » pour le « pouvoir d’achat »: « les Français vivraient moins bien » avec « une inflation alimentaire puissance dix, une explosion des prix de l’énergie puissance dix », a-t-il argué.
« Nous ne nous fixons pas de limite face à la Russie qui, elle, n’en fixe aucune », a ajouté le chef du gouvernement, après avoir rendu hommage « à la résistance exceptionnelle du peuple ukrainien », sous les applaudissements.
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À trois mois des élections européennes, alors que l’extrême droite caracole dans les sondages, l’aide à l’Ukraine est devenue un des thèmes clés de la campagne. Particulièrement depuis les propos controversés du président Macron qui n’a pas exclu l’envoi de troupes occidentales au sol et ne veut mettre « aucune limite » dans le soutien à Kiev.
Dans un hémicycle dégarni et moins agité qu’attendu, Marine Le Pen, tout en clamant son soutien à l’Ukraine, a accusé l’exécutif « d’instrumentaliser » la crise pour la « mettre au service d’un agenda électoraliste ». « Soit on est pro-Macron, soit on est accusé d’être pro-Poutine », a lancé la cheffe des députés RN, qui se sont abstenus.
Juste avant le vote, Gabriel Attal a haussé le ton face aux opposants à l’accord. « Je préfère bomber le torse qu’être à plat ventre devant la Russie », a-t-il lancé. « Aujourd’hui, il n’y a pas de négociation possible » avec Vladimir Poutine, qui veut « retirer sa souveraineté » à l’Ukraine.
« Tactiques électorales »
La gauche a étalé ses divisions. Insoumis et communistes ont voté contre. Chez LFI, Arnaud Le Gall a dénoncé un président Macron « va-t-en-guerre » et « boutefeu ». « La France n’a pas à s’enfermer dans un camp occidental, atlantiste », a-t-il grincé, en s’opposant à tout élargissement de l’Otan et de l’Union européenne à l’Ukraine.
L’accord de sécurité scellé le 16 février entre Paris et Kiev ne « trace aucune ligne rouge, aucune perspective de paix et participe à l’escalade », a abondé le chef du parti communiste, Fabien Roussel.
Dans ce drame, il y a bien un agresseur, Vladimir Poutine, et un pays en état de légitime défense, l’Ukraine, qu’il faut soutenir. Notre position n’a pas changé depuis.
Mais ne franchissons pas les lignes rouges !
La France ne doit pas entrer en guerre contre la Russie.
— Fabien Roussel (@Fabien_Roussel) March 12, 2024
La divergence est nette avec les socialistes, qui ont voté pour « aider l’Ukraine à tenir ». Le chef des députés PS, Boris Vallaud, a toutefois critiqué, comme l’ensemble de l’opposition, les « effets de manche (…) désinvoltes » d’Emmanuel Macron.
La patronne du groupe écologiste, Cyrielle Chatelain, a à son tour déploré la « rhétorique belliciste du président de la République », mais a soutenu l’accord, « pour la livraison d’armes, pour l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne, contre tout envoi de troupes au sol ».
À droite, LR a pesté contre « les petites tactiques électorales » du chef de l’État mais a affiché son soutien à Kiev et demandé des « actes » : « Ce dont l’Ukraine a besoin pour se défendre, ce ne sont pas des mots aventureux du président de la République, mais d’obus », a dit Olivier Marleix.
Dans sa déclaration, Gabriel Attal a défendu l’accord de sécurité franco-ukrainien du 16 février. Conclu pour une durée de dix ans, il comprend un renforcement de la coopération militaire, en particulier dans les domaines de l’artillerie et de la défense aérienne.
En 2024, Paris promet de fournir « jusqu’à trois milliards d’euros de soutien supplémentaire ».
« Ces trois milliards ne sont pas un chèque à l’Ukraine. Ils correspondent à la valeur maximale de notre aide militaire en 2024, notamment aux commandes passées auprès de nos industries de défense françaises », a expliqué le ministre des Armées, Sébastien Lecornu.
Il a assuré que l’envoi de troupes au sol combattantes n’était pas sur la table et le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, s’est voulu rassurant, lundi, en affirmant à des médias français que « tant que l’Ukraine tient, l’armée française peut rester sur le territoire français ».
Avec AFP