En cette matinée ramadanesque, une brume printanière embaume les grandes artères du quartier Agdal. Aux alentours de 9 heures du matin, les grandes administrations de l’avenue Fal Ould Oumeir ont à peine ouvert leurs portes. Des cohortes d’écoliers retardataires s’empressent à grands pas vers leur destination. Les cafés, pour des raisons évidentes, demeurent fermés, idem pour les restaurants dont beaucoup ont adapté leurs menus aux goûts du mois. Seules les enseignes américaines de fast-food dérogent à la règle, au grand bonheur des touristes qui semblent, dès 11h30, apprécier les joies d’un restaurant de junkfood sans files kilométriques.
A quelques encablures de l’avenue la plus courue du quartier, plus précisément à l’enceinte d’un centre commercial de la place, la fièvre acheteuse bat son plein et les affaires vont bon train. Il faut dire que, même s’il coïncide avec le mois sacré de l’Islam, un matin de mars reste un matin de mars. Autrement dit, en cette période calendaire, les fashionistas s’empressent de pratiquer, vaille que vaille, leurs activités fétiches, à savoir le lèche-vitrine et le shopping, et ce, dans l’optique de dénicher les meilleures trouvailles vestimentaires de la saison. Le Ramadan est, certes, le mois du recueillement et de la méditation spirituelle, mais cette activité permet à ses adeptes de meubler les longues heures de jeûne.
Place au farniente
Dans ce même centre qui commence à se remplir au gré des heures qui passent, les tables de la food-court sont, contrairement à leur vocation initiale, prises d’assaut par des personnes qui ne passent pas de commandes mais qui, devant leurs écrans ou smartphones, ont l’air de passer de bons moments de farniente.
A quelques enjambées de ces restaurants, près des magasins de résines aromatiques orientales, la sarghine et le benjoin exhalés parfument les lieux et en envoûtent plus d’un. Ces charmes qu’on dirait tout droit sortis du conte de fée des mille et une nuits font, d’ailleurs, un tabac en cette période de l’année.
A la sortie de ces lieux où seuls les appâts mercantiles font loi, les signes ostentatoires du Ramadan se font sentir à bien des lieues à la ronde, par les chants religieux et lectures coraniques émanant des taxis, des supermarchés et même des smartphones, dans les files qui commencent à s’allonger devant les billetteries de la gare ferroviaire Rabat-Agdal.
Houda BELABD
Le mois de Ramadan, le neuvième mois lunaire du calendrier islamique, est une période sacrée pour les musulmans à travers le monde. Pendant ce mois, les croyants observent le jeûne du lever au coucher du soleil, s’abstenant de manger, de boire et de tout autre plaisir physique. C’est aussi un moment de prières supplémentaires, de lectures du Coran et de charité envers les plus démunis.
En plein cœur du quartier Agdal à Rabat, la capitale du Maroc, la journée ramadanesque est bien différente des autres jours de l’année. Dès le lever du soleil, les rues sont désertes, les commerces fermés et une atmosphère de recueillement règne dans les ruelles du quartier. Les habitants se pressent vers les mosquées pour la prière de l’aube, avant de rentrer chez eux pour partager un repas léger avant le début du jeûne.
Au cours de la journée, les rues s’animent au fur et à mesure que les fidèles se rendent aux différents lieux de prière pour les cinq prières quotidiennes. Les marchés de rue semblent plus vivants que jamais, avec des vendeurs proposant des fruits et légumes frais, des dattes et des pâtisseries traditionnelles pour la rupture du jeûne.
L’heure de la rupture du jeûne, appelée le ftour, est un moment très attendu par les musulmans. Les familles se rassemblent autour d’une table chargée de plats délicieux, tels que la harira (une soupe traditionnelle marocaine), des dattes, des jus de fruits frais et des pâtisseries sucrées. Après avoir rompu le jeûne, les fidèles se rendent à la mosquée pour la prière du soir, appelée le tarawih.
La nuit tombe doucement sur le quartier d’Agdal, et une atmosphère de célébration et de spiritualité enveloppe les rues. Les adeptes marchent dans les ruelles illuminées par les lampes traditionnelles, se rendant aux veillées de prière organisées dans les mosquées. Ces moments de recueillement et de méditation permettent aux croyants de se rapprocher de Dieu et de renforcer leur foi pendant ce mois béni.
La journée ramadanesque en plein Agdal est une expérience unique, mêlant traditions ancestrales, piété religieuse et convivialité. C’est un moment de partage, de générosité et de solidarité entre les habitants du quartier, où chacun se retrouve autour des valeurs de l’Islam pour vivre pleinement ce mois béni.